20 avril : le tribunal d'Oslo condamne l'État Norvégien pour avoir imposé à Anders Breivik un traitement « inhumain » et « dégradant », en le maintenant dans un « univers totalement clos ». 30 juin : une adolescente israélo-américaine est poignardée dans une colonie d'Hébron par un palestinien. 7 juillet : cinq policiers tués et neuf blessés par deux snippers protestant contre les meurtres restés impunis de citoyens noirs par les forces de l'ordre. Trois faits divers qui peuvent être lus à travers l'éthique de conviction (qui défend un idéal, une certitude ou une cause, sans se soucier des effets potentiellement pervers induits) et l'éthique de responsabilité (qui place au centre de toute décision la mesure des conséquences des actes posés) chères à Max Weber. Anders Breivik, qui a massacré 77 personnes en 2011, n'est vraiment pas bien placé pour évoquer les droits humains : il n'a donc aucune légitimité à se plaindre (éthique de conviction). Mais, un État de droit garde-t-il la moindre crédibilité, s'il se met à varier dans l'application des règles selon la nature du délinquant qu'il juge (éthique de responsabilité) ? Une famille qui fait le choix d'occuper illégalement le territoire d'autrui prend le risque d'être victime de représailles (éthique de conviction). Mais, il n'y a rien de plus insupportable que d'assassiner une gamine qui n'a aucune responsabilité dans un conflit d'adultes (éthique de responsabilité). Un pays qui laisse les armes en libre circulation et acquitte les policiers meurtriers ne peut s'étonner que certains se fassent justice eux-mêmes (éthique de conviction). Mais, on ne peut à la fois combattre la peine de mort et la justifier quand elle s'applique à l'aveugle par vengeance privée (éthique de responsabilité). Qu'il est tentant de réagir par conviction. Mais on est vite confronté à l'éthique de responsabilité.

« J’aime la règle qui corrige l’émotion. J’aime l’émotion qui corrige la règle » affirmait Georges Braque.

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1192 ■ 29/09/2016