Discernement

L’agression physique ou psychologique commise par un éducateur sur un public vulnérable est et sera toujours inacceptable, parce que contraire à l’éthique d’une profession fondée sur la bienveillance et le devoir de protection. Rien ne peut la justifier, même si les conditions de travail parfois de plus en plus précaires et les problématiques de plus en plus dégradées de certains usagers constituent un terrain potentiellement explosif propice aux passages à l’acte. Nous n’allons pas nous laisser enfermer dans ce réflexe corporatiste si fréquemment utilisé par la hiérarchie policière pour couvrir les brutalités des forces de l’ordre, comme celles perpétrées tout au long du mouvement des Gilets Jaunes. Oui, des dérapages existent dans notre secteur et ils doivent être dénoncés et combattus sans hésitation, à l’image de la révélation, fin juillet, de cet éducateur usant d’un bâton, pour frapper un jeune adulte autiste pris en charge dans une maison d’accueil spécialisée des Pavillons-sous-Bois. Pour autant, tous les gestes sont-ils à placer sur le même plan ? Fin juin, des adolescentes fuguent d’une MECS d’Obernai. À leur retour, l’une d’entre elles agresse l’éducateur qui les recadre. Le professionnel lui demande d’arrêter de le taper, la menaçant de porter plainte. Pour se défendre, il finit par la faire chuter au sol. La scène filmée est diffusée sur internet. Et de bonnes âmes de porter des accusations de violence contre ce professionnel. Sous réserve de la divulgation de pratiques graves que l’enquête, diligentée par le parquet, pourrait établir, le fait de plaquer un enfant à terre, quand celui-ci se montre dangereux pour lui ou pour les autres peut effectivement être qualifié de violent. Mais, une réaction d’auto-défense ou de neutralisation est-elle assimilable à l’acte cherchant à faire mal ? Certes, la distinction est fragile et poreuse, le basculement étant rapide. Combattons les dérives, mais restons lucides sur la complexité de nos missions.

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1258 ■ 01/10/2019

« Bienvenue sur le site de Jacques Trémintin, travailleur social qui n’a cessé d’écrire. Référent à l’aide sociale à l’enfance de 1992 à 2020, partie prenante de Lien Social de 1995 à 2023, contributeur au Journal du droit des jeunes de 1995 à 2017, pigiste dans le Journal de l’animation depuis 1999… l’accompagnement des enfants et familles, le maniement de la plume ou du clavier, l’animation de colloques ou de formations répondent au même plaisir de transmettre. Ce que fait aussi ce site, dont le contenu est à libre disposition à une seule condition : savoir garder son esprit critique et ne rien considérer d'emblée comme vrai ! »

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