Erreur de jeunesse

Ils sont cinq ados se tenant piteusement debout devant le tribunal pour enfants. Ce ne sont pas des bandits, juste des pieds nickelés qui ont perturbé leur commune, pendant six mois. Gargarisés par leur impunité et à la recherche de toujours plus d’adrénaline, ils ont pourri la vie de leurs voisins : vol de scooter et détérioration de voiture (que l’on brûle ensuite pour effacer les traces d’ADN), hangar fracturé pour y prendre des motoculteurs qu’on laisse ensuite à l’abandon dans les marais, courses de MotoCross dérobés dans un garage ouvert par effraction, moutons laissés à divaguer après avoir ouvert leur enclos, cabanons visités au fond des jardins pour y prendre tronçonneuse et pinces coupantes et summum du défi : compétition pour savoir qui rapporterait le plus de valves de pneus de voiture. Qui dit qu’il n’y a qu’en ville qu’on s’amuse ? Ils ont bien rigolé lors de leurs équipées sauvages menées tard dans la nuit. Deux ans plus tard, ils rient moins devant leurs juges. Et la quinzaine de victimes assistant à leur procès n’ont pas vraiment goûté la plaisanterie. Les parents présents n’en mènent pas large. Les mamans éclatent en sanglot. Les papas sont écrasés de la honte. Seul un môme confie à son copain « J’ai téléphoné à ma daronne. Elle avait oublié ». Il se présentera seul à son procès. La gendarmerie n’a eu qu’à surveiller le « Bon coin » et recueillir les témoignages. Dans un bourg de quatre milles habitants, difficile de rester longtemps discrets. Trois heures seront nécessaires pour démêler les vingt cinq affaires traitées. Les cinq ados sont à quelques encablures de leur majorité. Ils ont grandi. Ils ont mûri. Ils ont compris. Ils sont en voie d’intégration : scolarisés, en apprentissage, en stage de la mission locale. Leurs éducateurs confirment leur bonne évolution. Le tribunal les déclarera coupables, mais ne prendra pas de sanction pénale. Juste quelques dizaines de milliers d’euros à rembourser au civil. Fallait-il vraiment être plus sévère ?

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1260 ■ 28/10/2019

« Bienvenue sur le site de Jacques Trémintin, travailleur social qui n’a cessé d’écrire. Référent à l’aide sociale à l’enfance de 1992 à 2020, partie prenante de Lien Social de 1995 à 2023, contributeur au Journal du droit des jeunes de 1995 à 2017, pigiste dans le Journal de l’animation depuis 1999… l’accompagnement des enfants et familles, le maniement de la plume ou du clavier, l’animation de colloques ou de formations répondent au même plaisir de transmettre. Ce que fait aussi ce site, dont le contenu est à libre disposition à une seule condition : savoir garder son esprit critique et ne rien considérer d'emblée comme vrai ! »

Retrouvez les sites

du Journal de l’animation : www.jdanimation.fr
et de mon collègue et ami Didier Dubasque : www.dubasque.org