Derrière les murs: surveiller, punir, réinsérer? La place du travail social en prison

OLIVIER Charline, Ed. érès, 2018, 244 p

Après dix années comme assistante sociale de secteur et deux au sein d’une gendarmerie auprès des victimes, Charline Olivier est recrutée par l’administration pénitentiaire. Le recentrage des conseillers d’insertion et de probation vers la criminologie et la prévention de la récidive a fait émerger la nécessité d’une relation d’aide et d’accompagnement, entraînant l’embauche de travailleurs sociaux et de psychologues. De fait, en cas d’incarcération, tout détenu doit faire face à une somme de démarches pour régulariser sa situation : logement, travail, surendettement, gestion financière, rapport avec différentes administrations, contact avec les services sociaux extérieurs… L’auteur se croyait en pleine capacité d’assumer cette fonction avec sérénité et professionnalisme, en affrontant la vidéosurveillance, les glaces sans tain, la promiscuité, les longues attentes parfois avant qu’une porte ne s’ouvre, le bruit, l’odeur, la dépression ambiante. Et puis, le piège poisseux de ce maelstrom de souffrance humaine s’est refermé sur elle. L’angoisse l’a envahie, l’oppression la gagnant au franchissement des portes. C’est la boule au ventre qu’elle finit par arriver à son travail. Son responsable lui a bien reproché une trop grande implication. Ses collègues lui ont conseillé de prendre de la distance et d’imprimer son propre tempo à son travail, sans se laisser entraîner dans celui attendu par les détenus. Diagnostic pertinent certes, mais qu’elle n’arrive pas à assumer émotionnellement. À lire son témoignage qui fourmille de récits de rencontres plus émouvantes les unes que les autres, on comprend mieux son désarroi. Courageux pour une professionnelle d’exprimer ce ressenti que tant d’entre nous éprouvent, mais que bien peu reconnaissent.

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1247 ■ 19/03/2019