Le roitelet à l’assaut du social

FA DIESE, Éd. Les trois colonnes, 2021, 141 p.

Cette assistante sociale a attendu d’être en retraite pour se lâcher. Et son récit confirme la lente dégradation du travail social. Au début de sa carrière, régnait une ambiance faite d’entente, de confiance et de solidarité réciproques, les cadres apportant une écoute attentive et bienveillante, respectant le travail de terrain. Les restructurations sans fin ont marqué l’amorce d’une autre époque, celle qui ne pense qu’à multiplier les niveaux de contrôle afin de réduire les dépenses sociales. Les postes d’encadrement se sont multipliés, en inventant des besoins artificiels pour justifier de leur utilité. Les illustrations de l’auteur sont surréalistes : depuis l’établissement d’un tableau récapitulatif destiné à mesurer la dérive concernant l’usage du papier toilette, jusqu’au fichier dédié à justifier chaque usage d’un timbre-poste, en passant par relecture des rapports renvoyés couverts de commentaires en rouge imposant une réécriture conforme à la norme exigée, sans oublier les quarante secondes maximum exigées des secrétaires pour toute communication téléphonique concernant de nouvelles demandes. Les postures professionnelles suivirent le même régime, avec les injonctions aux Conduites à tenir (CAT), selon les circonstances. Ce qui fut dès lors attendu ? Exécuter tout en renonçant à réfléchir et endosser l’uniforme de la servilité en devenant des marionnettes sociales privées de toute autonomie d’action. Et la hiérarchie de proclamer fièrement que la rigidification des règles d’attribution des aides financières avaient permis d’en réduire l’attribution de 50 % ! Quant aux chèques alimentaires ils furent supprimés, les usagers étant renvoyés vers les associations caritatives. Invraisemblable ? Et pourtant c’est une réalité qui a dépassé le stade de la simple menace. La preuve.

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1330 ■ 03/01/2023