De la police en démocratie

ROCHÉ Sebastian, Ed. Grasset, 2016, 376 p.

Si l’on en croit les autorités politiques et administratives ou les syndicats de policiers : tout va bien. Les forces de l’ordre de notre pays sont exemplaires, n’ont pas à se remettre en cause, la population devant leur faire aveuglément confiance. Quand un sociologue y regarde de plus près, la réalité est bien moins optimiste. C’est ce que fait Sebastian Roché avec rigueur et méthode. Les nombreuses études nationales et comparatives internationales placent nos policiers et nos gendarmes à une bien modeste place dans tous les classements : ce ne sont jamais ni les pires, ni les meilleurs, loin de l’arbitraire de certains pays minés par la corruption, mais tout aussi éloignés de modèles plus respectueux de valeurs démocratiques. Que peut-on donc leur reprocher ? On peut privilégier une évaluation quantitative en terme d’efficacité et de réactivité. Mais ce peut tout autant être des critères éthiques que l’on peut utiliser. Et, c’est surtout ce qu’attend la société. Là où l’autorité des forces de l’ordre devrait être légitimée par leur neutralité, leur impartialité, leur respect de la dignité, leur écoute des citoyens, la pierre de touche de référence fait appel à la peur qu’elles inspirent et la force utilisée pour se faire respecter. Leur boite à outil professionnelle n’est pas constitué pour l’essentiel par le lien de confiance tissé avec la population, mais par un arsenal de catégorisation et de stéréotypes associant appartenance à un groupe ethnique et délinquance. Ce qui explique que les minorités soient deux fois plus contrôlées que les citoyens blancs. Si la police française ne peut être qualifiée de raciste, elle est bien loin d’être immunisée vis-à-vis de comportements éthiquement biaisés. Des évolutions sont possibles. Encore faut-il que le politique ait le courage de les engager.

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1213 ■ 21/09/2017