La part d’ange en nous. Histoire de la violence et de son déclin

PINKER Steven, 2017, Ed. Les Arènes, 1.042 p.

Nous vivons une époque parmi les plus pacifique, depuis que le genre humain existe. C’est ce que nous démontre Steven Pinker, à force de schémas, de comparaisons historiques et d’études psychologiques. Le recul de la violence, il le relie à plusieurs processus qui se conjuguent. Le premier d’entre eux correspond à la pacification du monde. En cinq siècles, le taux d’homicides est passé de 100 à 1 pour 100.000 habitants. Et depuis 2000 ans, le nombre de morts au cours des conflits armés s’est réduit de 524 à 60 toujours pour 100.000 habitants. Depuis 1945, une longue paix règne en Europe, comme jamais elle n’en a connu. La révolution humaniste est passée par là. La guerre n’est plus vécue comme salutaire, glorieuse, héroïque, sacrée, exaltante et purificatrice, mais comme immonde, repoussante, barbare, vaine, néfaste et cruelle. Pendant longtemps, régna une orgie de sadisme totalement banalisé au coût humain faramineux : esclavage, servitude, massacres à grande échelle. Hérésie, blasphème, apostasie, adultère, pratiques sexuelles non conventionnelles menaient à l’éviscération, au bûcher, à l’exhibition des cadavres en putréfaction sur les gibets, au supplice de la roue. Une nouvelle sensibilité a mis au coeur des valeurs le bien-être, le souci de préservation de la vie humaine remplaçant la sauvegarde de l’âme. Les comportements humains on changé. La vengeance personnelle a été remplacée par la délégation à un État missionné pour protéger la vie, la liberté et la poursuite du bonheur de ses citoyens. Ensuite, le doux commerce international a convaincu les nations de préférer le négoce et la coopération à gain positif réciproque, aux guerres de conquête. Enfin, le contrôle de soi et la canalisation de ses émotions ont supplanté le tempérament impétueux et désinhibé qui provoquait l’affrontement, à la moindre frustration ou atteinte à l’honneur. Dernière révolution à l’origine de la mutation des moeurs, celle des droits. La société rejette de moins en moins la différence et de plus en plus l’intolérance à la dissemblance. Pourtant, à chaque progrès dans l’histoire de l’humanité, il se trouve des commentateurs pour affirmer que la situation n’a jamais été pire. Il est vrai que la violence perdure, que ce soit par prédation ou par vengeance, pour dominer, par sadisme ou par idéologie. Mais, si le répertoire cognitif et émotionnel n’a pas changé, l’environnement s’est transformé. Le sens moral, la raison, l’éducation, l’ouverture au monde, l’explosion de la connaissance sont autant de facteurs favorables à ce que la violence continue à régresser.

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1212 ■ 07/09/2017