La répétition des scénarios de vie

Jean COTTRAUX,  Odile Jacob, 2001, 280 p.

La répétition des mêmes échecs et des mêmes conflits constitue des situations fréquentes que les professionnels de l’aide et de l’éducation rencontrent souvent chez leurs usagers (quand ils ne le constatent pas chez eux !). C’est que les relations établies avec les autres ont parfois tendance à se répéter et à se ressembler suivant un style stéréotypé qui laisse une impression de contrainte et de perte de liberté. Identifier les scénarios de vie dont on peut rester prisonnier, afin de pouvoir s’en libérer : tel est l’enjeu qui permet de distinguer la personne agie du sujet agissant. C’est là le sujet de cet ouvrage qui s’appuie largement sur les travaux en biologie et en psychologie comportementale. Les variations de personnalité, explique l’auteur, sont dues pour 50 % à des facteurs héréditaires et pour 50 % au contexte environnemental, avec des hypothèses de correspondance avec certains neuromédiateurs. Face à toute nouveauté, l’être humain est confronté à deux types de réactions : une réaction courte qui favorise les réponses de survie immédiate (fuite ou affrontement), et une réaction longue qui privilégie plutôt un traitement lent et conscient.

La première voie dite « courte » se situe du côté génétique : ce sont les réflexes à l’origine des habitudes motrices et des actions automatiques. C’est d’abord la recherche de sensations nouvelles (que l’on retrouve chez les amateurs de sports à risque et les personnes sensibles à l’ennui). Cette attitude que l’on peut qualifier d’impulsive serait liée au niveau biologique à un fonctionnement exagéré de la dopamine. Second cas de figure, l’évitement de la menace qui correspond aux anxieux peut s’analyser à partir d’un dysfonctionnement de la sérotonine. On peut aussi évoquer l’introversion marquante chez les personnes distantes qui montre un déficit de la noradrénaline. La seconde voie dite « longue » se situe sur le versant conscient. Elle va, en fait, dépendre du degré de maturité et d’adaptation du sujet que l’on peut mesurer à partir tant de sa capacité d’autodétermination (sujet autonome capable d’agir sur le monde extérieur) que de son aptitude à la coopération (l’individu prend sa pleine place au sein de la société). C’est à partir de ces réactions inconscientes automatiques et des plans plus conscients que s’élaborent les scénarios de vie largement favorisés par les dysfonctionnements de la pensée logique : l’inférence arbitraire (tendance à tirer des conclusions sans preuves), la généralisation abusive (étendre un cas particulier), la maximalisation ou la minimalisation (donner ou réduire artificiellement l’ampleur d’un fait) ou encore l’abstraction sélective (tirer un événement de son contexte) sont autant de pratiques qui contribuent à nous enfermer dans différents scénarios. Une façon d’en sortir ? Les thérapies cognitives largement présentées ici par l’auteur.

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°596 ■ 08/11/2001