La parole de l’enfant - Aspects juridiques, éthiques et politiques

Jean-Pierre ROSENCSVEIG & Pierre VERDIER, Dunod, 1999, 237 p.

Si la parole de l’enfant doit pouvoir être entendue, elle doit aussi être protégée, car celui-ci est encore un être inachevé sur qui il ne faut pas faire reposer des responsabilités ne relevant pas de ses aptitudes. Ce n’est ni Jean-Pierre Rosenczveig ni Pierre Verdier qui vont se faire ici les avocats de l’enfant-roi. Si le droit a beaucoup évolué, il est un point qui est resté stable : jusqu’à ses 18 ans, l’individu n’est pas reconnu dans la pleine capacité de décider de ce qui est bon pour lui. C’est dans ces limites que, progressivement, la parole de l’enfant a été reconnue. Depuis 1966, il doit, dès qu’il a atteint ses 15 ans, consentir à son adoption.  Depuis 1984, il doit être consulté par les services de l’ASE, s’il en dépend, pour toute affaire le concernant. Depuis 1987, la loi Malhuret, concernant le droit du divorce, précise que « le juge doit tenir compte des sentiments exprimés par les enfants ». Avec la Convention Internationale des Droits de l’Enfant, c’est le droit d’être entendu dans toute procédure administrative ou judiciaire qui s’impose. La législation française a tenté, en 1993, de se mettre en conformité avec la Convention, en permettant que l’enfant soit entendu en justice, s’il en fait la demande. Seule restriction (de taille) : le juge n’est nullement obligé d’accéder à sa demande. L’un des éléments lui permettant de décider réside dans le discernement de l’enfant qui est défini comme « la disposition d’esprit qui permet de juger clairement et sainement les choses, du bien et du mal. » (p.86) En outre, tout dépend de la juridiction concernée. Le jeune délinquant est tenu de comparaître devant le juge des enfants, il est donc entendu. Le jeune en danger peut saisir de lui-même ce magistrat qui a la capacité de le recevoir seul sans ses parents et n’est pas obligé de répéter ce qu’il vient de lui dire. Ce n’est pas le cas du Juge des affaires Familiales qui ne peut garantir à l’enfant la confidentialité de ses propos. L’enfant qui comparaît devant lui a la faculté de parler, mais aussi de ne rien dire. « Pour autant, pas plus qu’une autre la parole de l’enfant ne doit jamais être prise comme vérité révélée. Elle doit être passée au crible comme n’importe quelle accusation portée par quiconque à l’égard de quiconque. » (p.73) Dans la vie courante, on distingue les situations où la volonté de l’enfant ne vaut que comme simple avis, celles où son accord est indispensable (émancipation ou changement de nom), celle où l’accord est nécessaire mais non suffisant (IVG), celle où sa seule volonté suffit (actes de tous les jours). Permettre à l’enfant de donner son point de vue et en tenir compte n’implique pas que ce soit lui qui décide ! « Il est normal que l’enfant donne son point de vue aux adultes ; il est tout aussi normal que ces adultes décident. » (p.116)

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°530  ■ 04/05/2000