Jamel le CRS. Révélations sur la police de Sarkozy

Jamel BOUSETTA, éditions Duboiris, 2007, 178 p.

« Même si nombre de policiers sont des types extraordinaires » affirme Erik Blondin, secrétaire général du Syndicat de la police nationale, « les actes et propos racistes, les violences illégitimes, l’arrogance et les provocations, les insultes et les menaces envers les citoyens »  non seulement « sont monnaie courante », mais « ces dérives sont couvertes par l’institution » (P.9). La préface à l’ouvrage de Jamel Bousetta ne fait pas dans la dentelle. Le récit de l’auteur, non plus. L’itinéraire de Jamel Bousetta est de ceux qui sont des plus improbables. Dernier d’une famille de sept enfants, il garde surtout de sa jeunesse le souvenir de la misère, de l’entassement dans un 30 m² et des mauvais traitements d’un père alcoolique, toutes choses qui le poussèrent dans la rue et la délinquance. Mais à 18 ans, il décide de choisir une révolte plus intelligente que violente : devenir flic, pour enquêter sur la police nationale. La première affectation de Jamel est pour le Centre de rétention administratif de Paris, juste avant que cet établissement ne soit fermé par le gouvernement, sous la pression du rapport du commissaire européen Alvaro Gil-Robles. Il y est témoin de scènes permanentes d’insultes et d’humiliations subies par les étrangers qui y sont détenus. Puis c’est au commissariat de Hay-les Roses qu’il continue son apprentissage : il y découvre les contrôles au faciès, le racisme, l’alcoolisme, les violences (coups de boule et de matraques, gifles…) de la part de fonctionnaires qui se considèrent tout permis et au-dessus des lois. Avant dernière étape du parcours du combattant, l’Ecole nationale de la Police à Draveil où Jamel croise un certain nombre d’élèves qui ont manifestement des comptes à régler et entendent utiliser la police comme un moyen légal de se rendre justice ! Dernier stade de formation, l’école de Police de Nice, pour un stage de spécialisation de CRS, puis l’affectation  à la CRS de Deuil-la-Barre (95). Au bout de trois ans, amaigri, triste et détruit psychologiquement, l’auteur craque : « j’ai refusé d’accepter, de tolérer et de couvrir des pratiques indignes des valeurs de la République. » (p.21) Après une tentative ratée de suicide (son pistolet n’a pas fonctionné), il commence par donner une longue interview au Point, avant d’écrire cet ouvrage. Malgré les pressions, les menaces, il a décidé de tout déballer et de dénoncer une police qui viole trop souvent les principes des Droits de l’homme et d’égalité républicaine. De son expérience, il ne regrette rien et estime n’avoir jamais démérité : « j’ai fait mon travail de flic correctement, je n’ai pas trahi l’uniforme et je me suis appliqué à respecter les règles de notre code de déontologie. » (p.141) Il appelle de ses vœux un changement dans la police dont les dérives ne doivent plus être tolérées : « ce ne sont pas forcément les banlieues qu’il faut nettoyer au karcher, mais du côté des délinquants qui polluent le ministère de l’intérieur. » (p.147)

 

Jacques Trémintin -  LIEN SOCIAL ■ n°833 ■ 22/03/2007