Bas les voiles !

Chahdortt DJAVANN, Gallimard, 2003, 48 p.

Voilà, reconnaissons-le, une charge violente et sans grand ménagement contre l’islam. Cette religion qui a connu, en des périodes essentielles de son histoire, des épisodes d’une tolérance et d’une fantastique ouverture d’esprit (et qui est vécue encore ainsi, à bas bruit, par des millions de pratiquants), est aujourd’hui rongée par des extrémismes très médiatisés. Les généralisations dans lesquelles tombe ici l’auteure, s’expliquent par le fait qu’ayant grandi en Iran, l’occasion ne lui a pas vraiment été donnée de connaître autre chose que l’expression totalitaire, policière et tyrannique d’une religion qui a élevé, dans ce pays, au rang de principe de vie, le viol permanent de la dignité humaine. « Ceux qui sont nés dans les pays démocratiques ne peuvent pas savoir à quel point les droits qui leur paraissent naturels sont inimaginables pour d’autres qui vivent dans les théocraties islamiques. » Et d’expliquer la honte qui pèse sur la fille parce qu’elle n’est pas un enfant mâle : dès sa plus tendre enfance, elle intériorise l’idée que son existence est une menace pour le garçon et pour l’homme. Plus elle sera pudique, plus son père, ses frères et son mari auront de l’honneur et du zèle. Tout contact, toute tentative de rapprochement entre les deux sexes déshonore l’homme musulman : « une fille n’est rien. Le garçon est tout. Une fille n’a aucun droit, le garçon a tous les droits ». La dévalorisation juridique et sociale de la femme dans un Islam qui ne la considère pas comme une personne à part entière, continue l’auteure, sa mise sous tutelle masculine va de pair avec son statut d’objet sexuel. Elle est définie essentiellement par et pour le regard de l’homme, par et pour le sexe et le mariage. Ayant fui la barbarie religieuse de son pays d’origine, on imagine les réactions de l’auteure quand elle a vu le pays où elle s’est réfugiée, rattrapé par les miasmes des persécutions qui l’avaient tant fait souffrir. Le port du voile, explique-t-elle, est le symbole du retour à l’archaïsme. Même s’il s’agit là du résultat d’un certain repli face à la dureté du pays d’accueil, d’une manière de se protéger contre les ratés de l’intégration, ce voile sert à endoctriner et à éduquer à l’aliénation, en imposant au corps la marque sexuée de la dépendance. Si la loi française n’interdit pas aux majeurs consentants de le porter, l’autoriser à l’école serait conforter la domination du dogme islamique et freiner l’émancipation. Peut-être, un séjour en Afghanistan ferait le plus grand bien à celles qui estiment que le voile les libère, conclut Chahdortt Djavann.

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°699 ■ 04/03/2004