Pourquoi vos enfants s’ennuient en classe

Marie-Danielle PIERRELEE, Agnès BAUMIER, éditions Syros, 1999, 225p.

Le constat est ici limpide : les collégiens s’ennuient massivement dans une école qui est surtout pour eux l’occasion de se retrouver avec leurs copains. On a voulu que tous les jeunes accèdent au collège unique, mais on a conservé le cadre adaptée à l’élite d’hier. L’évolution du système scolaire est en panne face à toute une série d’obstacles.

Il y a d’abord une laïcité qui prétend traiter tous les élèves sur le même plan comme à l’époque où il s’agissait d’unifier le pays contre l’obscurantisme religieux dans un même élan revanchard contre l’Allemagne. Aujourd’hui, proposer le même enseignement à tous les élèves revient à faire s’ennuyer les meilleurs et placer les plus faibles en situation d’échec. En refusant à juste titre la répartition des classes entre bons et mauvais élèves, on a juste réussi à reconstituer des filières officieuses regroupant les enfants des milieux aisés dans les sections européenne, allemand renforcé ou encore russe !

Second obstacle important, la conviction qui veut que l’école soit avant tout un lieu d’instruction et non d’éducation, cette dernière étant renvoyée aux familles. Les professeurs seraient seulement dispensateurs de savoir alors même que ce qui compte pour la réussite des élèves c’est tout autant la qualité des relations établies avec eux.

La résistance du milieu enseignant constitue un autre facteur d’immobilisme. Pourquoi, après tout, remettre en cause des méthodes pédagogiques qui leur ont si bien réussi en ce qui les concerne ? Il existe bien des expériences pédagogiques riches et innovantes, mais celles-ci restent encore trop marginales.

Que propose donc, alors, l’auteur ?

Elle suggère l’instauration d’un système de tutorat, un professeur prenant en charge un groupe de dix élèves, les accueillant en début de chaque journée et les suivant dans leur itinéraire scolaire, servant de médiateur tant par rapport aux autres professeurs qu’aux parents.

Elle suggère une diminution massive des horaires de cours qui doivent cesser de vouloir remplir une ambition encyclopédique. C’est la recherche d’une tête bien faite plutôt que bien pleine préconisée dès le XVIème siècle par Montaigne.

Elle suggère l’abandon du groupe-classe au profit de groupes de niveau où chaque enfant trouverait sa place en fonction de ses aptitudes. « Il y a égalité des chances simplement si chacun peut être reconnu dans son domaine et si aucun domaine ne prétend à l’hégémonie sur tous les autres » (p.122).

De telles propositions pourraient se concrétiser au sein d’établissements pilotes qui expérimenteraient une telle réforme pour en tester les conséquences et l’opportunité. Mais cela signifie faire face aux résistances conservatrices et  accepter les remises en cause en s’appuyant sur tous celles et ceux qui s’impliquent contre le statut quo.

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°486-487 ■ 20/05/1999