La médiation scolaire par les élèves

Jean-Pierre BONAFE-SCHMIDT, ESF, 2000, 216 p.

Tout est parti des USA où depuis 1972, c’est plus de 7.000 projets qui se sont montés pour tenter de remédier, par le biais de la médiation, à la montée de la violence dans les établissements scolaires. En France, le système éducatif n’a pas vécu à l’abri des évolutions majeures de la société, et a connu lui aussi en son sein l’aggravation des conflits. Les premières sensibilisations à la médiation datent de 1991 et les premières expériences de 1994. L’idée est simple : former des enfants et des jeunes (de primaire, collège ou lycée) afin de leur permettre d’aider à résoudre les querelles entre élèves et entre élève et profs. Cette démarche s’est heurtée à tous ceux qui ont été tenté de pénaliser tous les manquements à la vie scolaire en préférant un appel à l’institution judiciaire plutôt qu’une gestion en interne. Et puis, il y a eu ceux qui ont objecté que cette médiation risquait d’inciter les adultes à la démission, en transférant sur les enfants des responsabilités qui ne relevaient pas d’eux. L’auteur nous présente ici les résultats d’une recherche-action qu’il a menée, durant deux ans dans trois zones d’éducation prioritaire (dans le Rhône et en Seine Maritime) à propos de la mise en place de projets de médiation scolaire. L’état des lieux préalable, les représentations des acteurs, les modalités de sensibilisation, de recrutement et de formation des médiateurs ainsi qu’une première tentative d’évaluation des résultats constituent le corps de l’ouvrage. Y sont notamment développés les rituels et axes d’intervention de l’action des médiateurs : écoute active, compréhension des problèmes de part et d’autre, établissement d’un climat de confiance, réduction des tensions, recherche de solutions enfin. De cette étude, il ressort que la médiation scolaire -à l’image des autres formes de médiation- demeure encore très minoritaire étant donné la toute-puissance de la culture de la loi qui s’oppose à la culture de la négociation. Pour la plupart de ceux qui constituent la communauté scolaire, il y a  un attentisme pour beaucoup lié à une conviction qui veut qu’au travers d’un conflit ce soit l’un ou l’autre qui l’emporte, conception tout à fait antagoniste de la vision américaine  du « win win » basée sur la recherche d’un accord mutuellement acceptable et équitable pour les disputants. Ce dont il s’agit ici, c’est bien de faire émerger une véritable contre-culture qui devra se battre pour s’imposer. Des trois ZEP étudiées par la recherche-action, une seule  a pu préserver et étendre l’action de la médiation scolaire. Et l’auteur de conclure : « seul un changement profond des mentalités, allié à des modifications structurelles, favorisera l’émergence  de la médiation comme nouvelle forme d’action commune »  (p.211)

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°553 ■ 23/11/2000