Le pédéraste et le pédophile à l’école

PETITOT Thierry, L’harmattan, 2007, 101 p.

Foisonnant, ce petit livre d’un collègue éducateur, tourné vers la sociologie et les sciences de l’éducation. La tradition républicaine veut que la sexualité tant de l’enfant que de l’enseignant reste aux portes de l’école. Pourtant, les agressions pédophiles perpétrées à l’école, même si elles relèvent de l’épiphénomène, démontrent que certains professeurs ne peuvent réfréner leurs pulsions et passent à l’acte, profitant de l’aubaine que leur procure leur position professionnelle. L’enfant, loin de vivre dans un monde d’insouciance et de sécurité, n’est donc pas au sein de l’institution scolaire complètement à l’abri de la folie de l’adulte. Pendant longtemps, cette réalité sera restée taboue. En fait, la pédophilie existe en matière d’éducation, depuis la nuit des temps. L’antiquité grecque fit du pédéraste un enseignant incontournable dont seule l’élite profitait ! La vision de l’enfant a depuis totalement changé. Dans nos civilisations contemporaines, son corps est sacralisé et il est considéré digne d’une protection et de soins spéciaux. L’âge de relations sexuelles est codifié, menant en prison celles et ceux qui veulent l’ignorer. Pour autant, affirme l’auteur, il ne faudrait pas bannir l’affectif de l’école au risque de la déshumaniser complètement: « sans amour il est impossible d’enseigner » (p.45) Transmettre un savoir peut difficilement se faire en restant indifférent à celui ou à celle à qui on le transmet. Aimer ses élèves n’est pas en soi pervers. Cela peut tout autant structurer que détruire l’enfant. Quelle différence peut-on alors établir entre celui qui prend le corps de l’enfant pour un objet de ses désirs et celui qui le considère comme le sujet des connaissances qu’il apporte ? Ce qui les sépare, c’est la distance nécessaire et vitale qui permet à l’enfant de grandir et de s’émanciper. Le pédophile est avant tout amoureux de lui-même. Il est resté fixé à un stade de son développement psychologique, social et sexuel. En s’enamourant de l’enfant, il croit se voir dans les yeux de sa victime qui joue avant tout le rôle d’un miroir rassurant. Le pédagogue, quant à lui, prend une place, qu’il le veuille ou non, peu ou prou, de substitut de figure parentale. A ce titre, il est investi par l’enfant dans une relation d’attachement et est attiré lui-même par celui-ci. Mais, il est avant tout là, pour l’Autre. L’enthousiasme et la passion qui implique l’amour de celui à qui il enseigne, est là pour développer la spécificité de son élève et non le garder sous son emprise.

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°896 ■ 11/09/2008