L’origine sociale des élèves

RAYON Patrick (sous la direction), 2019, Éd. Retz, 2020, 156 p.

L’école française est confrontée au curieux paradoxe d’être ouverte à tous, tout en restant éminemment élitiste. Elle est au cœur d’un mythe à la double facette : elle serait impuissante ou au contraire toute puissante. Le recueil d’études sociologiques présentées ici se donne pour ambition de déconstruire l’un et l’autre. La démonstration a été faite depuis longtemps que le système scolaire ne préserve pas les élèves contre les inégalités liées aux origines sociales. Les enfants de parents diplômés on quatorze fois plus de probabilités de l’être à leur tour, que les enfants de parents qui ne le sont pas. Et s’il n’a pas été possible d’établir un lien causal mécanique entre souci de réussite des parents et les résultats obtenus, on ne peut pas plus évoquer le mérite des enfants dont l’effort serait couronné de succès. Autant d’argumentations qui ne font qu’exonérer l’injustice sociale, pour ne retenir que la responsabilité individuelle. Les élèves qui réussissent sont ceux qui savent s’approprier ce qu’on attend d’eux, la culture proposée reproduisant celles des classes dominantes. Mais, à l’inverse il est tout autant faux de prétendre que tout est joué d’avance et qu’à défaut d’appartenir aux élites, on ne peut qu’être en échec scolaire. La preuve en est que tous les modèles scolaires existant à travers le monde ne sont pas aussi sélectifs. L’école est un espace de rencontre entre des pratiques singulières d’enseignement et des élèves certes plus ou moins bien préparés, mais singuliers. Et ce qui se vit au cœur de la classe n’est pas négligeable. L’origine socio-économique, pour importante qu’elle soit, peut voir ses effets s’aggraver ou au contraire être relativisés par ce qui se joue entre enseignants et élèves ou entre élèves. Autant d’éclairages trop souvent ignorés.

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1278 ■ 01/09/2020