Seul contre tous

Faut-il (peut-on) défendre un point de vue juste contre l’avis de la majorité ?

Le 19 décembre 2020, la lauréate du concours Miss France reçut plus de cinq cent messages d’insulte sur les réseaux sociaux. La raison de cette haine en ligne ? Elle avait révélé être d’ascendance israélienne. Septembre 2021 : des petits de sixième se font copieusement insulter suite à un challenge lancé Tik Tok, incitant à stigmatiser les enfants nés en 2010.

On pourrait en déduire avec Claude Chabrol que « l’intelligence a des limites, la bêtise n’en a pas ». Même si rien ne peut excuser de tels comportements, il faut aussi essayer de comprendre leurs motivations.

Soumission ou résistance ?

En 1951, le psychologue Solomon Ash mena une expérience pour mesurer le pouvoir du conformisme. Il réunit un groupe de sept étudiants dont un seul membre n’était pas complice. Il s’agissait de vérifier la capacité de ce dernier à résister à l’avis de ses compères qui tous donnaient un avis convenu d’avance, allant à l’encontre de l’explication pourtant évidente à une question posée à tous. Comment ce sujet « naïf » allait-il se comporter : soutenir un avis minoritaire ou se plier à la majorité ? 36,8 % s’alignèrent sur la fausse réponse, se mettant ainsi en conformité avec le groupe. Les calomniateurs de Miss France et les anti-2010 sont-ils respectivement anti sémites ou harceleurs ? Certains oui. Mais beaucoup ont peut-être cherché à se rallier aux messages qui apparaissaient comme majoritaires.

 

Jacques Trémintin – Journal de L’Animation ■ n°224 ■ Décembre 2021