Comment l’alcool se conjugue-t-il au féminin ?

Le premier verre d’alcool et la première cigarette que la famille autorisait autrefois à son fils, le jour de sa communion solennelle, renvoyait à un rite de passage vers l’âge adulte : « bois, mon fils, tu seras un homme ». Les filles n’étaient pas concernées. En Croatie, à l’apparition des menstruations, c’était les membres les plus âgés du cercle familial qui buvaient … un verre de vin rouge ! Si un garçon est autorisé culturellement à des excès, une fille ne doit jamais se le permettre. La pochtronne a toujours été décriée, là où le soiffard gardait un statut de bon vivant. Tous ces stéréotypes sont en train d’être déconstruits. Faut-il, pour autant, au nom de l’égalité entre les sexes, banaliser la maladie alcoolique chez les femmes qui-auraient-le-droit de-s’arsouiller-comme-les-mecs ? S’il y a bien un domaine où la parité n’est guère attendue, souhaitée ou préconisée, c’est bien cette addiction longtemps symbole de la virilité masculine. S’il faut cesser toute stigmatisation venant distinguer le degré de légitimité d’une pratique addictive, en fonction du genre, il est nécessaire pour tous ceux et toutes celles qui en sont captifs de s’attaquer autant, sinon plus, aux causes qu’aux effets. « Comment la personne s’alcoolise ? » n’est pas plus important que de se demander « pour quelles raisons le fait-elle ? ». Et comme toujours, la prévention étant plus efficace que le curatif, avant de préconiser aux plus âgés l’abstinence, si on apprenait aux jeunes garçons et aux jeunes filles le « bien boire », les limites à donner à son enivrement et la priorité à accorder à la qualité sur la quantité ? Vaste programme !

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1315 ■ 12/04/2022