Retrouver sa dignité

Les pensions de famille ont le vent en poupe. C’est 10 000 places supplémentaires que le gouvernement voulait ouvrir entre 2017 et 2022. Trop confidentiel, ce dispositif mérite d’être connu pour les innovations qu’il symbolise. On peut en identifier au moins trois. La première tient dans la mutation qui promeut : non plus l’hébergement, mais le logement. Distinguo essentiel quand on sait l’importance que représente l’opportunité d’avoir son chez-soi, de posséder la clé de là où l’on vit et de disposer à sa guise de son lieu de résidence. La seconde originalité réside dans l’articulation entre la préservation de son intimité et la possibilité de se joindre, si on le souhaite, à une vie collective (préparer les repas, manger ensemble, participer à des activités). Enfin, un détail qui fait toute la différence : la pérennisation. Les grands exclus qui les fréquentent ne disposent pas forcément de toutes les ressources mobilisables dans un délai fixé c à l’avance permettant de rebondir rapidement : situation d’isolement affectif, familial et/ou social, parcours antérieur fait de ruptures et souvent de séjours à la rue, difficultés à assumer seul le quotidien dans un logement, problèmes de santé, physique et/ou psychologique, voire psychiatrique … autant de facteurs qui fragilisent et rendent aléatoire une vie pleinement autonome. La durée de séjour n’est pas limitée dans le temps. Il n’est plus question de cultiver un inconfort sensé inciter à se mobiliser, mais de sécuriser pour rendre possible ce qui l’est, au rythme de la personne, avec tout l’accompagnement social nécessaire.

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1317 ■ 10/05/2022