Le colloque annuel de la CNAPE était consacrée au réseaux sociaux (1). Quelle drôle d’idée, pour cette noble institution, d’avoir confié ces rencontres au profane que je suis, équipé d’un portable « Doro » à clapet destiné aux seniors, alors que j’ai bien juré ne jamais m’approcher de près ou de loin de Face-de-bouc, d’Amstragram ou de Tic-et-Tac. Bon, tout s’est finalement très bien passé. Instructives, enrichissantes et passionnantes furent les interventions proposées, qu’elles soient issues du terrain ou de la recherche. Si mes préjugés furent juste un peu écornés, ma conviction a vite été acquise quant à la nécessité de ne pas laisser nos publics seuls sur ces réseaux sociaux capables du meilleur comme du pire. Les échanges qui s’y nouent sont, parait-il, parfois d’une grande utilité. Pourtant, ils m’apparaissent bien plus proches des pires ergotages du café du commerce. Mais, au moins, au troquet, on boit un coup et on ne prend pas le risque de recevoir le poing de son interlocuteur dans la figure après l’avoir agoni d’insultes ! C’est sans doute pour cela que les travailleurs sociaux doivent être présents dans ce monde virtuel : pour faire entendre d’autres échos, d’autres registres et d’autres arguments que ceux qui se confinent parfois dans la médiocrité, la bêtise et l’infox. Le travail social a toujours su s’adapter aux mutations de son époque et s’accommoder des nouvelles technologies. Et si l’accès aux réseaux sociaux le contraint à des ajustements en matière de technique, de méthodologie et de réflexes, son déploiement permettra d’y diffuser son éthique, ses valeurs et ses convictions humanistes. Le fameux « aller-vers » qu’on ne cesse de promouvoir doit y trouver une nouvelle illustration : ne pas attendre d’être sollicité, mais aussi y retrouver les plus fragiles. Vaste défi pour l’inculte virtuel que je suis !

(1) « Société 2.0 : quelles pratiques en prévention spécialisée ? » 16-17 novembre 2022, Paris

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1335 ■ 14/03/2023