L’art de se tirer une balle dans le pied

Le bilan des émeutes du début d’été 2023 est impressionnant : partout en France on a compté 2 500 bâtiments dégradés (dont 168 écoles et 105 mairies), 12 000 véhicules incendiés, 24 000 feux sur voie publique.

Le département de la Vienne n’y a pas échappé. Dans la nuit du 30 juin au 1er juillet 2023, deux commissariats ont été complètement détruits, lors des émeutes urbaines survenues à Poitiers. La même nuit, le centre commercial d'Ozon, à Châtellerault était incendié mettant à l'arrêt une dizaine de commerces.

La colère de la jeunesse s’est exprimée d’une manière brutale, après la mort de Nahel. Mais nos gouvernants n’ont toujours rien compris. L’hypothèse d’un rapport de cause à effets avec les discriminations, les humiliations et les stigmatisation vécues dans les quartiers de relégation a bien vite été écartée. Le gouvernement n’a eu comme seule réponse que sécuritaire : rétablir l’ordre.

Quant au Conseil départemental de la Vienne, la décision qu’il vient de prendre est totalement hors-sol. Elle démontre le même aveuglement. Lors du vote de son budget annuel, le 29 mars, il a entériné une baisse de la dotation annuelle allouée au service de Prévention Spécialisée de l’ADSEA 86 de 250 000 €. Résultat : suppression de 5 postes de professionnels et disparition des équipes sur 3 des 9 territoires couverts jusque-là, ce qui représente environ 400 enfants et familles qui ne seront plus accompagnés.

La prévention spécialisée n’a pas et n’aura jamais comme fonction de prévenir les émeutes. Son travail consiste à s’attaquer à ses causes potentielles. Dans ce département, c’est depuis les années 1970, que les éducs de rue vont au contact de ces jeunes et de leurs familles qui sont confrontés aux ruptures successives de leur parcours d'insertion tant social que scolaire ou professionnel. Les équipes se rendent disponibles, écoutent la détresse de populations particulièrement fragiles, réfléchissent aux actes de délinquance avec le public concerné, tentent une réponse qui prévienne, qui alerte, qui soigne, qui guérit et qui évite, fabriquent des solutions avec les ressources existantes en voie de raréfaction.

Le paradoxe de la prév’, c’est bien qu’on en mesure l’efficacité à l’aune des effets délétères auxquels pousse le désespoir. En ouvrant des portes, en stimulant les forces vives, en déployant sa confiance dans les potentiels des jeunes et de leur famille, elle insuffle un espoir qui rend moins fatales la révolte, l’émeute, les mises à sac. Faudrait-il donc que tout explose à nouveau, pour mesurer l’importance de la prévention ? Pas sûr que nos élus n’en déduisent pas une réponse encore plus répressive !

Il faut soutenir les équipes de prévention de la Vienne : soutienprev86@gmai.com  !

La casse du travail social a déjà commencé depuis longtemps par les éducs de rue. A qui le tour ?

 

Signez la pétition : : https://chng.it/fskzmH9D

https://www.change.org/Sauvons-les-Educs-de-rue-de-la-Vienne