Patriotes de tous les pays, renoncez !

Qu’il est parfois difficile d’assumer l’appartenance à un pays se montrant scélérat, indigne et malfaisant dans bien des domaines.

En tout bien, tout honneur, commençons par le nôtre ! A la fierté bien infantile face à un quelconque record national obtenu dans telle ou telle discipline sportive, face à une performance économique de telle ou telle grosse entreprise de notre pays ou face à l’excellence de notre gastronomie, il est d’autres prouesses qui ne peuvent que nous remplir de joie. Ainsi, de l’abandon depuis des années de dizaines mineurs français dans les camps de réfugiés syriens, quand dans le même temps notre gouvernement déplore que certains pays refusent d’accueillir leurs ressortissants. Ainsi, du refus de prendre en charge les bateaux ayant recueilli quelques dizaines de migrants rescapés du naufrage en Méditerranée, quand depuis 2022 notre pays a généreusement (et à juste raison) accueilli 100 000 réfugiés ukrainiens. Ainsi, de la menace proférée par l’Etat de s’attaquer aux 156 millions d’euros dédiés à l’aide alimentaire, quand selon un rapport de la commission d’enquête du Sénat publié en juillet, le montant total des aides publiques aux entreprises en France s’élève à environ 211 milliards d’euros par an. Qu’il est douloureux de se revendiquer « français », sauf à se reconnaître dans ces actions solidaires quotidiennes menées par les centaines de milliers de professionnels et de bénévoles qui sauvent ce qui reste encore debout de l’honneur national.

Mais qu’il doit être infiniment plus douloureux de porter la nationalité israélienne, quand son gouvernement d’extrême droite est responsable depuis bientôt deux ans de crimes de guerre à répétition, articulant l’extermination de la population civile, l’arme de la famine et le règne de la terreur. Sauf à appartenir à cette catégorie de déserteurs, de manifestants brandissant dans la rue les affiches d’enfants palestiniens sacrifiés et autres participants aux grèves générales contre la guerre, la seule susceptible de sauver leur peuple de la catégorie des parias. Malheureusement, ces oppositions restent marginales, une large majorité d’israélien s’enfermant dans le déni, voire la complicité. Tels les 82 % d’entre eux qui soutiennent l’expulsion forcée des habitants de Gaza et la majorité opposée à l’entrée de l’aide humanitaire ! Illustration terrifiante de la façon dont un pays moderne et démocratique bascule dans le pire des colonialismes, dans l’avilissement et l’infâmie. Est-ce pour cela que 40% des habitants de ce pays pensent à le quitter ? « La citoyenneté israélienne est fondée sur les pires types de crimes violents que nous connaissons et sur une litanie croissante de mensonges destinés à blanchir ces crimes » affirmait, Avi Steinberg, fin décembre 2024, auteur né en Israël ayant annoncé renoncer à sa citoyenneté (selon Slate). Mais pour aller où ? C’est bien volontiers que je les accueillerai comme voisins, en tant que frères humains !

Mais, ce tour d’horizon de la honte ne serait pas complet si l’on ne citait pas tant d’autres pays ne valant guère mieux dans le politique nationale ou internationale… La liste serait trop longue. Contentons-nous d’évoquer ces palestiniens écartelés entre une autorité officielle corrompue de part en part et un mouvement théocratique fondamentalisme maniant en permanence la terreur et le crime. La défense de ces millions de femmes, d’hommes et d’enfant opprimés par l’armée d’occupation israélienne ne peut ni de près, ni de loin, justifier le basculement vers le régime du Hamas qui ne vaut guère mieux. Le changement de nationalité de ceux qui vous assujettissent, vous torturent ou vous emprisonnent, rend-il l'asservissement plus supportable ? Décidément, plus que jamais, le slogan de Charlie Hebdo s’impose, en le paraphrasant quelque peu : « que c’est triste d’être défendu par des cons » !

D’où qu’il vienne, le patriotisme nécessite de se boucher le nez et de se munir d’œillères pour tenter d’ignorer le sang et le malheur qu’il engendre partout.