Pour un féminisme de la nuance

D’un côté, la pensée réactionnaire affirme que le patriarcat a disparu, remplacé par la tyrannie des femmes. De l’autre, la fraction la plus radicale du mouvement féministe prétend que notre société est prisonnière d’un paradigme systémique anti-féminin, nécessitant le rejet des hommes hors de regroupements non mixtes. Y a-t-il une place entre les deux ? Je la revendique ! Si l’abjecte désignation de « crime passionnel » longtemps donnée aux meurtres conjugaux doit être abolie à jamais, doit-on la remplacer par la notion de « féminicide » (= « tuer une femme parce qu’elle est une femme ») ? Comment faudrait-il alors dénommer les quelques femmes qui en font de même avec leur mari : homonicide ? Et ceux des homosexuels ôtant la vie de leur conjoint : gayicide ? Ce qui semble en cause, n’est-ce pas plutôt le rapport de pouvoir, de soumission, d’asservissement qui se noue au sein de certains couples ? Il faudrait alors plutôt parler de « dominicide », ce meurtre sur une personne, non tant en raison de son genre, que de la volonté de l’assujettir (la subordination ou la mort) ? Cette question sémantique pourrait sembler bien futile, quand on prend connaissance de l’inquiétant sondage montrant chez 23 % des 18-24 ans, la conviction qu’une femme qui dit non, dit en réalité oui et du plaisir qu’elle prend à être forcée. Ils sont 36 % à estimer qu’il en est de même, quand elle se fait insulter et humilier. De quoi démontrer la résistance du machisme ? Sauf que des chercheurs américains ont enquêté sur le portrait sociologique de leurs compatriotes féministes et ceux revendiquant leur antiféminisme. Le résultat est étonnant : les deux camps se prononcent dans des proportions très proches pour l’égalité des salaires entre hommes et femmes, pour le droit à l’avortement et pour l’élection de plus de femmes aux postes de pouvoir. Comme quoi la réalité est infiniment plus contrastée et complexe que le tableau manichéen qui nous en est parfois dressé.

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1312 ■ 01/03/2022

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Laëtitia - 2 - Du côté des professionnels
Ce qu’un éducateur peut dire, après avoir regardé la série de Jean-Xavier de Lestrade sur France 2. Qu’en est-il de la représentation de la protection de l’enfance dans la fiction faisant le récit du viol, meurtre et dépeçage de Laëtitia Perrais vivant en famille d’accueil en Loire atlantique ? C’est, sans doute, son angle mort, son scénario se montrant bien plus erratique. On voit apparaître la même ...
Où finit le diagnostic et où commence le pronostic?
Il est essentiel de comprendre la situation de celui que l’on veut accompagner… à condition de ne pas l’enfermer dans ce que l’on croit comprendre de lui.  Le diagnostic social est au cœur de toute démarche professionnelle. Face à une problématique individuelle ou collective, d’abord viennent l’écoute et l’observation attentives ; puis l’identification tant des difficultés existantes, que des...
Balta François - Débats contradictoires
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Les divergences devraient nous enrichir plutôt que de nous diviser François Balta, médecin psychiatre, formateur et superviseur, enseigne l’Approche Systémique (Coopérative) depuis plus de trente ans auprès -entre autres- de travailleurs sociaux. Privilégiant un travail conversationnel et coopératif, il fait ici l’éloge du partage des idées : l’échange des analyses que chacun réalise à partir ...
Puaud Davis - La radicalisation
dans Interviews
« L’action de prévention de l’animateur ne peut se réaliser que sur la durée » Anthroplogue, ancien éducateur de rue, David Puaud est aujourd’hui formateur-chercheur à l’Institut Régional du Travail Social Poitou-Charentes. Spécialiste des marges urbaines et du contrôle social, il a réalisé de nombreuses enquêtes au sein de quartiers populaires. Sa fine connaissance du terrain lui permet de ...
Dur, dur, d’être Directeur
Il arrive aux meilleurs de connaître des revers de destinée. La mauvaise passe traversée par Pascal Vivet ne l’empêche pas de garder un regard critique sur les mutations en cours. On connaissait le Pascal Vivet, coauteur avec Stanislas Tomkiewicz du célèbre « Aimez mal et châtiez bien », premier ouvrage à dénoncer en 1991 les maltraitances institutionnelles (à une époque où cela n’était pas encore ...
Handistar 2006 - Carentoir (56)
Pendant deux jours, des artistes porteurs de handicap et des spectateurs valides et porteurs aux aussi de handicap se retrouveront pour une méga fête à Carentoir dans le Morbihan. Le lecteur de Lien Social commence, à présent, à bien connaître ce festival Handistars qui se déroule au coeur du parc animalier de « La ferme du monde ». Nous nous sommes attachés depuis des années à présenter et à ...

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