L’esprit de la médiation

Jacqueline MORINEAU, érès, 1998, 176 p.

Etre en conflit est inhérent à l’être humain. La violence est une force de vie. Tout individu a la capacité de se transformer en sortant de sa confusion et en retrouvant une liberté d’action constructive. Ce sont là trois concepts de base qui fondent la raison d’être de l’esprit de la médiation. Tout homme est animé par le désir. Quand ce désir va dans le même sens que celui de l’autre, c’est l’harmonie. Quand ce n’est pas le cas, il y a conflit. De tout temps les sociétés ont instauré des règles pour réguler ces conflits et permettre une vie communautaire. Il y a le système judiciaire dont le principe consiste à confier à une tierce personne le soin de dire le droit et de départager les protagonistes en désignant qui a tort et qui a raison. La médiation, si elle peut fort bien cohabiter avec la justice ne répond pas pour autant aux mêmes principes. Il ne s’agit pas alors de sanctionner une faute, mais de l’intégrer et de la dépasser dans une perspective d’avenir. L’auteur établit un parallèle entre le fonctionnement de cette médiation moderne et la fonction cathartique jouée dans l’antiquité par la tragédie. « La tragédie nous aide à reconnaître dans le conflit cette part d’opacité et ‘inexplicable qui est en nous même » (p.82) L’une et l’autre peuvent être appréhendées selon le même schéma. Au départ, il y a l’exposé des faits, chaque partie écoutant et échangeant ses remontrances et justifications réciproques. Puis vient l’expression de la souffrance et des émotions. Ce n’est que parce qu’on a autorisé l’expression de  ces sentiments que l’on peut aller au-delà et construire un futur malgré ce conflit ainsi exprimé. Dans la procédure de médiation, le sujet est reconnu dans sa capacité à réfléchir et à élaborer les solutions qui viendront régler les différents. Le médiateur n’est pas le sage qui tranche mais le tiers extérieur qui accompagne et chemine aux côtés des acteurs. Il doit savoir travailler sur les ressentis, tant d’ailleurs les siens que ceux des protagonistes. Il doit offrir un cadre sécurisant où puisse être néanmoins accueillie la violence, où vont cohabiter agresseur et agressé avec pour objectif, l’apaisement final. Les qualités requises pour intervenir dans ce type de rôle relèvent de l’humilité et de l’aptitude à entrer en empathie avec les adversaires qu’il s’agit de transformer en interlocuteurs.

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°482 ■ 15/04/1999