Distance professionnelle et implication dans la relation d’accompagnement

Les Cahiers de l’Actif n°460-461, Septembre-Octobre 2014, 266 p.

Tout travailleur social est confronté, dans sa recherche de la bonne posture, à une trop grande ou trop faible implication, en même temps qu’à une trop grande ou trop faible distanciation, par rapport à la personne qu’il accompagne. Quelle proximité lui faut-il adopter ? Sa fonction de technicien de la relation le conduit à une recherche d’objectivité fondée sur des connaissances en sciences humaines. Mais, intuitivement autant qu’empiriquement, il sait l’absurdité d’une telle quête. Sa volonté d’établir une relation de sujet à sujet l’incite à se laisser affecter par autrui et à se prêter tant aux projections affectives réciproques, qu’aux manifestations d’émotions émergeant inévitablement, de part et d’autre. Les risques inhérents à l’affection sont bien connus : attachement fusionnel, indifférenciation entre soi et l’autre le réduisant à l’identique, dépendance, captation, chantage affectif, toute-puissance, protectionnisme aliénant la liberté d’autrui… Mais, les pièges de la désaffectation le sont tout autant : annulation d’autrui par exclusion, neutralité illusoire, aveuglement sur ce qui se joue de toute façon en soi, comme chez l’autre… Les contributeurs le rappellent clairement : la désimplication n’est pas distanciation et l’implication n’est pas contiguïté. Et de prôner une éthique de la proximité qui, située entre la fusion et le clivage, consisterait d’abord non à dénier, mais à assumer sa subjectivité, ses affects et ses émotions. Mais, il convient aussi de gérer la dynamique des relations transférentielles et contre transférentielles. Enfin, il s’agit d’accepter d’articuler le personnel, l’intime et le professionnel, tout en garantissant une attitude inconditionnellement bienveillante, articulée sur le non jugement et la disponibilité. La bonne proximité, donc, et non la bonne distance.

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1172 ■ 29/10/2015