L’inconnu du B.L.B.

STREIFF Gérard et des jeunes du Bois L’Abbé, érès, 2009, 133 p.

Un atelier d’écriture, comme il en existe des dizaines. Mais celui-ci est proposé à des jeunes de banlieue, ceux-là même que l’on a si souvent tendance à diaboliser. L’échec scolaire y fait des ravages, dit-on. Pourtant, ces « cancres » raffolent de l’écriture, celle qu’ils mettent en musique à travers le rap. De là, à se lancer dans la rédaction d’un roman policier, il n’y a qu’un pas à franchir que leur propose Gérard Streiff. Et, ça marche : tout au long du premier semestre 2006, mercredi après mercredi, ils vont venir rencontrer l’écrivain qui a mis en forme leurs idées exprimées la semaine précédente. Ils lisent le nouveau chapitre proposé, le critiquent, le commentent, le corrigent, l’amendent et proposent de nouvelles idées, de nouveaux textes de chanson. Cela se passe à quelques encablures de Paris sur les hauteurs du Val de Marne, dans le quartier du Bois L’Abbé (B.L.B.). Au final, un polar qui nous plonge dans un univers bariolé et chatoyant, celui du quotidien de ces mômes. L’intrigue commence sur un air qui n’est pas sans rappeler les émeutes de 2005. Un bus est en train de brûler au milieu des pompiers et des CRS. Ibrahim qui sillonne les lacis de la cité sur son scooter, pour livrer des pizzas, aperçoit un corps allongé inanimé. Il n’aura de cesse que de retrouver trace de ce jeune homme, qu’il croit mort. Cette quête est l’occasion de découvrir la vie de cette banlieue qu’on ne peut résumer à la seule révolte de ceux qui y vivent. S’il y a des moments de tension, il y aussi la fête. Certes, on y retrouve l’incontournable compétition musclée entre quartiers, remake de la guerre des boutons. Mais les rites et les traditions organisent un vivre ensemble marqué par de fortes personnalités autant que des gens du commun. Avec, quand même, quelques animateurs et médiateurs traînant dans le coin pour mettre de l’huile dans les engrenages.

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°974 ■ 27/05/2010