Autisme et travail : un défi

TREESE-DAQUIN Catherine, Éd. L’Harmattan, 2020, 290 p.

L’altération de la communication, des interactions sociales et de la perception des signaux émotionnels chez une personne avec autisme rendent-ils difficile, voire impossible son insertion professionnelle ? L’auteure a voulu répondre à cette question, en recueillant le témoignage de cent cinquante personnes concernées, âgées de douze à soixante ans. Les propos qui constituent le matériau de base de son étude sont révélateurs. Certains assument leur autisme, comme Xavier qui l’a indiqué dans son CV, quand Max a simplement indiqué « RQTH » (Reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé) dans sa lettre de motivation. Certains sont autonomes, d’autres demandent un soutien. « On a besoin d’être accompagné par sa maman ? » a commenté un DRH, alors que Gérald avait son éducatrice, à ses côtés. Il est encore difficile de faire admettre la légitimité d’une compensation, au même titre que pour les mal-voyants ou les malentendants. « Le pire, c’est l’entretien d’embauche », concède Cassandre. Quand on a demandé à Philippe quel était son job de rêve, il a répondu « quand je dors, je ne rêve pas du travail ». Pour Rayan, « le plus dur pour l’inclusion au travail, ce sont les collègues » : réunions professionnelles, déjeuners en commun, pause-café peuvent constituer un vrai cauchemar. Et puis, il y a les bruits et les odeurs, les bousculades et les lumières, tant dans les trajets pour aller au travail que dans les open-space … autant de sollicitations sensorielles compliquées à supporter. Les difficultés à communiquer, à se réguler et assimiler les règles de l’entreprise des 600.000 adultes concernés par l’autisme ne sont pas encore bien décodées. Pourtant, si les employeurs sont méfiants au départ, ils sont souvent agréablement surpris, ensuite. Certes, ces salariés particuliers peuvent se montrer lents et fatigables et avoir besoin de prévisibilité et de consignes explicites. Mais, leur sens du détail et de la précision, leur ponctualité et leur mémoire peuvent devenir des atouts majeurs. Ce qui n’est pas plus simple à gérer. Après six mois sur son poste, les collègues d’Alain lui ont demandé de ralentir son rythme : « en termes de rendement, j’en faisais plus qu’eux, ça les gênait ». La nécessaire adaptation du poste de travail devient encore plus évidente, quand un cadre autiste prend la responsabilité d’une équipe, comme l’illustre l’un des témoignages de ce livre.

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1289 ■ 16/02/2021