ANAS - 2003 : Synthèses des journées

Synthèse des journées de l’ANAS

Pour synthétiser les trois journées que nous venons de passer ensemble, j’ai fait un choix très subjectif.
Dans l’option que j’ai prise, je ne recherche pas le consensus et ne prétends pas vous assener une quelconque vérité.
Je pars simplement du ressenti que m’ont laissé nos échanges et vous propose une vision qui ne pourra qu’être partielle et partiale.
Je déclinerai donc ce travail à partir de trois entrées : les mutations, les adaptations et la résistance.
Les mutations d’abord qui sont celles qu’a connu notre société depuis une trentaine d’années.
Les adaptations, ensuite, que notre profession a su opérer pour répondre aux défis des profonds changements opérés.
La résistance, enfin, qu’il nous faut exercer sous peine de perdre notre âme.

 

1- Les mutations

Commençons donc par l’état des lieux qui a pu être dressé et qui permet de prendre la mesure de mutations en cours.

Maryse Esterle-Hedibel a dépeint un tableau bien peu réjouissant.

Avec 4 millions de personnes vivant avec moins de 538 € par mois, la situation de l’exclusion n’a guère évolué depuis quelques années.

On est loin du 4% de progression annuelle du pouvoir d’achat ouvrier enregistré entre 1945 et 1975.

Notre pays a laissé réapparaître la figure du travailleur pauvre en y rajoutant une absence de perspectives et d’avenir qui confine au désespoir. On sait facilement dénoncer les manifestations de violence dont les populations les plus stigmatisées se rendraient coupables. On déploie moins de sagacité pour en rechercher les causes dans la violence sociale et l’insécurité initiale qui sont autant de facteurs déclenchants.

Tout au contraire, quand on essaye d’expliquer le sort réservé aux plus pauvres, on ne sait qu’externaliser les causes. On n’hésite pas à pathologiser les manifestations de souffrance en les isolant de leur contexte.

Le surendettement des familles ? C’est qu’elle ne savent pas bien gérer leur budget. La responsabilité d’une société qui généralise l’identification du bonheur à l’acquisition de biens de consommation ? Point.

La délinquance de certains jeunes ? C’est à cause des parents qui sont démissionnaires. La responsabilité d’une société de consommation qui dégouline de produits que les plus pauvres ne peuvent acquérir qu’en se saignant aux quatre veines ? Point.

Les élèves en échec scolaire ? Il faut les envoyer voir une psychologue. La responsabilité d’une école qui cherche plus à sanctionner qu’à régler les problèmes en s’interrogeant sur ses propres dysfonctionnements ? Point.

Le gouvernement actuel préfère opter pour une politique de camouflage de la misère et de gestion de l’ordre public plutôt que d’essayer de s’attaquer aux problèmes de l’exclusion et de chômage qui d’ailleurs ont disparu des préoccupations principales affichées par le Président de la République.

L’action sociale serait-elle tombée en panne ?

Le travail social est toujours le produit de conditions économique, sociales et politiques à un moment donné, nous a expliqué Michel Chauvière.

Ce sont ces circonstances historiques que Marie-Thérèse Paillusson a décrites, en nous expliquant comment, tout au long de la construction européenne, les fondements de l’action publique n’ont cessé d’être ébranlés.

Ce processus s’est opéré au même rythme qu’étaient remis en cause tant l’Etat nation que le monopole étatique du service public. Les revendications locales d’autonomie et la concurrence du privé ont été les principaux facteurs de désorganisation.

Les Etats membres coincés entre une logique supra nationale et les politiques décentralisatrices n’ont toujours pas réussi à se mettre d’accord sur une définition commune de la fonction publique et les règles éthiques s’y rattachant.

Le changement de rôle opéré par l’Etat s’est fait sentir sur l’action sociale.

Un glissement progressif l’a vu renoncer à exercer lui-même des prestations au profit d’un rôle de régulateur et de financeur des initiatives associatives.

Sont apparus des thèmes faisant largement la place à des notions de rentabilité, de transformation des usagers en consommateurs de service.

Ces orientations seront confirmées par Michel Chauvière qui notera la tentation au nom de l’intérêt de l’usager, de remplacer les subventions accordées aux associations par une solvabilisation des personnes handicapées transformées en clients devenant partie prenante d’un marché. 

Mais, dans le même temps, il s’attachera néanmoins à infirmer l’idée selon laquelle on serait sorti de l’Etat providence. Non seulement, affirmera-t-il avec force, le dispositif français de solidarité et d’intégration n’est pas en régression, mais il s’est encore affirmé au cours des dernières années (CMU, APA …).

Le pire n’est donc pas arrivé et n’est pas destiné à arriver. Ainsi le projet d’assurances privées qui viendraient concurrencer la sécurité sociale n’a pas trouvé de relais politique, même chez les plus libéraux.

Michel Chauvière s’est montré très critique face à la perception du local qui serait bon par essence ou encore une relation égalitaire qui placerait sur un pied d’égalité tous les niveaux de pouvoir : commune, département, région pouvant traiter d’égal à égal avec l’Etat.

Tout au long de son intervention, il sera même d’une ironie mordante à l’égard d’André Trillard, Président du Conseil générale de Loire Atlantique. Il fera rire l’assistance à ses dépends, mais provoquera aussi une certaine gène, certains congressistes trouvant facile que l’on critique ainsi un absent.

Pourtant, pour une fois qu’un homme politique accepte d’affronter un public de travailleurs sociaux alors que d’habitude ils inaugurent les colloques ou les concluent en coup de vent, il aurait été dommage de se priver de sa présence. D’autant qu’elle a été remarquable.

Monsieur Trillard nous est apparu comme le prototype de l’élu qui nous démontre son éloignement des logiques des travailleurs sociaux : il aura beau se prévaloir de la présence à ses côtés de sa femme assistante sociale, il nous avouera avoir dû comme président de la commission sociale apprendre tout le Verdier.

 Ses propos ne seront pas marqués par la langue de bois : il n’hésitera ni à incriminer des services d’Aemo suspects à ses yeux de gabegie, ni à déplorer la réunionite des travailleurs sociaux qui coûte plus cher en salaires que ce que représentent les aides financières accordées ni à rappeler que trop de professionnels agissent en échappant au cadre fixé par l’institution. Ses propos ne seront pas que négatifs puisqu’il évoquera ces professionnels qui ont des talents qu’on ne sait pas toujours utiliser à bon escient et son refus d’une autonomie locale qui aboutirait à une collection d’égoïsme, les régions riches se développant parallèlement aux régions pauvres.

Exercice tout à fait intéressant qui permet de mesurer le fossé qui nous sépare de nos employeurs. Le constat que l’on peut dresser, c’est que, finalement, ils sont à leur place et nous nous devons rester à la nôtre et entrer en relation à partir de ces divergences.

Restait Kofi Yamgnane qui expliquera son parcours d’immigré togolais arrivé trop tôt dans notre pays, pour être sans papier et qui, exploit dans notre classe politique, gagnera les ors de la République comme secrétaire d’Etat à l’intégration.

Sympathique et attachant, ce monsieur qui affirmera qu’on ne peut jauger le travail sur l’humain comme on évalue une production ou encore qui rappellera lui aussi la nécessité de préserver le principe de l’égalité des droits des citoyens qui ne peut être garanti que par l’Etat.

Mais, Kofi Yamgnane expliquera « out of the record » avoir dû faire face avec ses collègues conseillers généraux du Finistère, quand l’assemblée départementale est passée à gauche, à une grève de 15 jours des personnels médico-sociaux, excédés par l’un des choix du nouvel exécutif : instaurer un guichet unique.

Comme quoi, même les politiques éminemment sympathiques peuvent contrarier les professionnels.

Se pose la question : les travailleurs sociaux seraient-ils hostiles à tout changement ?

Que neni.

Simplement, comme le proclamera avec force Jacques Ladsous : ils veulent participer à l’écriture des politiques sociales, car ils refusent d’être de simples exécutants, ils en sont aussi les concepteurs.

Et ils montrent en permanence et depuis des années leurs capacités d’adaptation.

 

2- Les adaptations

Le secteur de l’action social fourmille d’initiatives qui se développent à bas bruit, mais qui mettent à mal l’idée d’un secteur qui serait figé et peu propice à l’innovation.

 

Ainsi l’atelier n°1 était consacré à la consultation du CHU de Nantes pour femmes enceintes en difficulté.

Ce service reçoit des femmes enceintes qui désirent abAndonner leur enfant. Il les accompagne sans jamais peser sur leur décision, en se refusant ni à les approuver, ni à les décourager. Il n’y a ni jugement moral, ni traitement stigmatisant, ce qui permet des grossesses et des accouchements de qualité.

Cette expérience a été l’objet de beaucoup de questions destinées à mieux comprendre le mode de fonctionnement, mais aussi à en évoquer les implications sociales : les dénis de grossesse, le délai de deux mois de rétractation qui serait peut-être trop court, l’existence en Allemagne de boite à abandon, l’impensable de cet acte etc …

 

L’atelier n°10 a abordé la parole de l’usager au travers de l’expérience d’une émission diffusée sur France Culture.

Se sont trouvées questionnées les règles de déontologie (comment préserver la vie privée et le secret professionnel quand on accompagne la prise de parole dans les média).

Il s’est avéré que les usagers sont en capacité de s’exprimer du moment qu’on leur en laisse la possibilité mais que cela doit avant être tout un outil et non une fin en soi.

Le constat a été fait qu’il pouvait même il y avoir une convergence entre leur parole et celle des professionnels.  Car une institution qui est confronté aux difficultés de ses agents, les traite trop souvent comme on traite parfois les usagers : en réduisant leur problématique à des difficultés d’ordre psychologique.

Alors que la prise de parole permettrait peut-être d’engager une analyse institutionnelle.

 

L’atelier n°12 a questionné le rapport des professionnels à l’intimité des familles.

Habitués à s’immiscer dans leur vie privée, les intervenants ne font pas toujours dans la dentelle quand ils écrivent au juge.

L’article 12 de la convention des droits de l’homme qui garantit contre toute intrusion est le plus souvent bafoué.

Ce n’est pas seulement lors des visites à domicile que le champ officiel d’intervention est fréquemment débordé. Il est fréquent que les couloirs, salle de réunion, voire les lieux publics bruissent de propos tenus sur les usagers dont la première qualité n’est pas toujours ni la bienveillance, ni la discrétion.

Respecter les familles, cela commence peut-être par la reconnaissance et la confiance qu’on leur accorde.

 

L’atelier n°4 avait décidé de plancher sur la clinique de la concertation : comment mettre en présence des familles et des professionnels de l’aide, du soin, de l’éducation et du contrôle quand les rapports de confiance sont détériorés.

L’expérience a été menée à Orléans. Elle regroupe une trentaine d’institutions différentes et des familles.

La démarche consiste dans un travail de communication autour de situations bloquées et vise à revitaliser les ressources des différents acteurs.

Cela passe, entre autre par une élaboration des notions de travail en réseau (distinction entre consultation, coordination et concertation), de gestion de conflit (du conflit de pouvoir au conflit de compétence), la nécessaire sélection des informations utiles à partager, la valorisation des champs de recouvrement des compétences spécifiques des différents professionnels etc …

 Cette pratique n’a pas la prétention d’apporter une réponse universelle mais d’être complémentaire et surtout de proposer une alternative possible aux blocages.

 

L’atelier consacré à Internet a été victime de son succès, littéralement pris d’assaut par des professionnels qu’on dit pourtant parfois rétifs aux nouvelles technologies (28 participants le premier jour pour … 5 ordinateurs). De nombreuses illustrations ont pu démontrer l’intérêt de cet outil en matière de pratiques sociales : support à la valorisation d’actions collectives (pouvant être exposées sur un site), mutualisation des expériences de chacun (qui peuvent être largement diffusées à faible coût), opération culture du cœur (mise à disposition d’une billetterie gratuite pour les plus démunis), possibilité de communication avec les pays d’origine (avec projet d’action collective pour y envoyer ordinateur et webcam).

 

Dans l’atelier n°9, où était posée la question comment être assistante sociale autrement et quelles prises de risques cela pouvait représenter, quatre professionnelles ont relaté leur expérience. 

Tout d’abord l’exercice de la profession sous statut de travailleur indépendant, bien que marginal, (20 professionnelles  recensées en 2000), a suscité de nombreuses questions qui ont permis d’échanger sur les valeurs, les questions d’éthique, l’indépendance de la profession et la place des usagers et des professionnels dans les différents systèmes privés ou publiques.

Une autre assistante sociale, cadre de la CRAM a raconté son parcours, mettant en avant l’impérieuse nécessité d’accepter les responsabilités d’encadrement comme seul moyen d’être présente, au niveau de l’élaboration des politiques sociales.

Une troisième collègue, devenue art-thérapeute, a mis en avant ce que quitter l’exercice habituel de la profession lui avait fait découvrir de ses propres freins au changement, et de la force qu’elle y a puisé pour elle et dans la relation avec les personnes, souvent en difficultés à cause des changements qui leur sont imposés.

Attachement au métier d’assistante sociale, à ses valeurs fondatrices, fort engagement personnel, et enthousiasme sont les points communs de ces récits, étant entendu qu’« autrement » n’est pas synonyme de « mieux » et que les prises de risques se font tant au niveau professionnel que privé.

 

Toutes ces initiatives sont loin de faire le tour de ce qui se passe à travers la France.

Il n’y a là rien qui puisse nous étonner.

Depuis qu’il existe, le travail social a su construire ses propres connaissances et acquérir ses capacités d’expertise, comme le rappellera avec brio Cristina de Robertis : donnant pour exemple le surendettement des ménages qui avait été identifié bien avant que les politiques ne légifère à son égard.

Les professionnels ont connu des mises en cause successives :
▪       l’accusation d’un contrôle social exercé au bénéfice des riches dans les années 70,
▪       la fièvre de l’évaluation et l’injonction à la rentabilité dans les années 80,
▪       les Cassandre d’une disparition des professions canoniques dans les années 90. 

A chaque fois, le travail social est réapparu de ses présumés cendres comme un Phoenix, s’enrichissant décennie après décennie de nouvelles méthodes venant non pas se substituer mais enrichir les précédentes : approches globales et systémiques (années 70), approches collectives (années 80), nouvelles explorations autour du contrat, du travail en réseau, de la médiation et du projet (année 90).

Le travail social est dans une perpétuelle dynamique de création et de renouvellement de ses repères et de ses techniques.

Quant à ses finalités, elles relèvent  de valeurs qui, comme l’a expliqué Brigitte Bouquet, ne sont pas originales. Elles traversent notre société et viennent éclairer les pratiques professionnelles. La répartition entre les valeurs humanistes (respect, écoute, libre arbitre, dignité, loyauté, intégrité, tolérance...), les valeurs du droit (droits des usagers, secret professionnel...) et les valeurs démocratiques (justice sociale, laïcité, citoyenneté...) se trouvent malmenée par les mutations sociétales. Ainsi,  l’individualisation synonyme de perte de socialisation et d’effondrement des appartenances collectives, mais aussi la montée du néo-libéralisme qui favorise les dispositifs et procédures au détriment de l’usager, sans oublier le recours au droit comme seule régulation qui mène à la judiciarisation. Comment les professionnels peuvent-ils se comporter face à de tels chambardements ? En sachant poser un questionnement éthique face aux paradoxes entre intérêt du sujet et intérêt de la société, entre aide et contrôle, entre intervention dans la durée et intervention dans l’urgence, entre qualité de l’action engagée et rentabilité. C’est là que se situe la résistance à la standardisation de nos pratiques.

 

3- La résistance

Maryse Esterle-Hedibel terminera son intervention en constatant qu’on entendait beaucoup les syndicats de policiers et d’enseignants, mais rarement les travailleurs sociaux.

Jacques Ladsous rappellera que cette corporation constitue une masse de 600.000 salariés qui restent pour l’instant bien silencieux.

Cristina de Robertis répondra aux inquiétudes exprimées dans la salle sur la nécessité et la possibilité de réagir en prenant les moyens de se faire entendre.

Michel Chauvière expliquera que le fondement de l’action sociale possède un enracinement et une légitimité qui lui viennent de la révolution  et de la continuité républicaine.

Serait-ce un appel à la révolte ?

Plutôt à nous faire entendre et à savoir nous opposer quand l’action engagée va à l’encontre de nos convictions.

Et, nous avons la légitimité pour le faire.

C’est, du moins, ce que nous a brillamment démontré Madame Harsfeld.

En tant que professionnels nous bénéficions :

▪       d’une légitimité institutionnelle : nous sommes recrutés et missionnés pour accomplir notre tâche,
▪       d’une légitimité démocratique : nous sommes impliqués auprès des usagers dans une logique contractuelle de services rendus,
▪       d’une légitimité de compétence : nous avons un savoir-faire tant en matière de régulation des dysfonctionnements, qu’en terme de conseils, de montage d’opérations complexes ou d’interface entre l’individu et la société.

Mais cette légitimité n’est jamais donnée d’office ou acquise une bonne fois pour toutes.

Il nous faudra toujours la revendiquer et la co-construire.

Hélène Hatzfeld évoquera cinq postures productrices de cette élaboration : s’exposer (se confronter aux autres, comprendre leur logique), prouver (fournir un système argumentatif), être éprouvé (démontrer la pertinence de sa place), s’accorder (être capable de se coordonner et de s’articuler aux autres) et enfin échanger.

Voilà un programme d’action ambitieux qui permettra aux congressistes de repartir ce soir, en sachant quelle stratégie peut être mise en œuvre.

Certaines et certains d’entre nous retrouveront là tout ou partie de ce qu’ils (elles) font déjà. 

D’autres pourront utiliser des axes qui viendront enrichir leur pratique professionnelle.

C’est ce qu’a fait l’atelier n°11 qui a réuni les professionnels de la filière hospitalière, leur permettant de mettre en commun leur problématique et de faire émerger les conditions d’exercice de la profession qui semblaient à toutes incontournables.

 

C’est aussi l’objet de l’atelier n°6 et 7 qui ont présenté le partenariat dans lequel est engagé l’ANAS.

 Les échanges ont été consacrés à la place du politique dans l’action sociale et la place du professionnel dans le politique : il n’est pas toujours facile de trouver la juste articulation entre l’action militante qu’elle soit associative, syndicale ou politique citoyenne et l’action professionnelle. Mais peut-on préserver très longtemps la dichotomie entre l’intervenant et le citoyen ?

Les usagers ont des revendications. Les professionnels aussi. Est-il possible de prendre soin des autres sans au préalable prendre soin de soi ?

Les deux ateliers ont conclu sur la nécessaire synergie et complémentarité qui ne signifient pas pour autant confusion. On parle aisément  de l’erreur qui consiste à ne pas s’adresser à la globalité de l’usager. Il y aurait quelque incohérence à refuser d’appliquer le même principe à l’intervenant.

 

Michel Chauvière a démontré que le principe d’une redistribution d’une partie du revenu national n’a pas encore cédé le pas au principe libéral de responsabilité individuelle.

Même si, on ne peut résumer l’action sociale à la distribution de subsides, en oubliant que c’est bien la parole qui vient humaniser cette aide.

C’est ce thème qu’ abordé l’atelier n°3. Après l’accident de l’usine AZF, un fond d’urgence a très vite été débloqué. On a demandé aux agents sur place de faire remplir sans justificatif, une demande d’aide à toutes les personnes qui en feraient la demande. Les personnels ont eu à faire face à de foules excitées et agressives venues exiger ce qu’elles considéraient comme un dû. Il a fallu faire intervenir des vigiles et la police pour éviter l’émeute. La dynamique de solidarité a été cassée au profit d’un chacun pour soi.

Un certain nombre d’assistantes sociales ont refusé de jouer le rôle qu’on voulait leur faire jouer s’attirant les foudres de leur direction.

Pourtant, l’inadéquation de l’indemnisation comme seule réponse aux victimes sera confirmée au cours de l’atelier par des professionnels ayant dû agir après les inondations ou les tempêtes.

 

L’atelier n°12 nous servira de conclusion. Consacré à l’éthique, il s’est attaché à réfléchir sur notre démarche professionnelle en se centrant sur les questionnements plus que sur les réponses. 

Nous laisserons ces quelques réflexions s’insinuer doucement dans vos esprits et y prendre ou non du sens.
L’éthique supplante la morale et la déontologie en ce qu’elle interroge sur ce qu’on fait avec l’autre avant de dire si c’est bien ou pas.
Elle invite à distinguer  la personne de ce que je dis d’elle, à se méfier du mythe de la transmission qui prétend dire ce qu’est la personne au travers de la seule représentation qu’on en a.
Il est nécessaire d’aller au-delà de ce qui nous apparaît au premier abord.
A chaque fois qu’on parle de quelqu’un, on doit être en mesure de lui donner la parole et ainsi savoir ce qu’elle dit, elle : c’est là la meilleure façon d’ouvrir une brèche dans nos certitudes.
L’objectivité consiste à surtout situer sa propre subjectivité.

 

Aussi, je vous en conjure, ne croyez surtout pas tout ce que je viens de vous rapporter.