Enseignants et éducateurs face au handicap

AMARE Sandrine et MARTIN-NOUREUX Philippe Éd. érès, 2017, 277 p.

L’école et le médicosocial ne peuvent plus être considérés comme des territoires aux frontières étanches, l’inclusion les confrontant à un partenariat ne leur laissant plus le choix. Pourtant, chaque univers continue à fonctionner dans l’entre-soi, chacun se cantonnant dans un clivage sectoriel. L’occasion pour les deux auteurs, respectivement éducatrice spécialisée et enseignant de décrire la culture spécifique à chaque profession. D’un côté, une école républicaine construite historiquement en distanciation d’une influence religieuse extérieure et sur la revendication d’une égalité confondue avec une uniformité excluante pour les élèves aux besoins différents. Et qui est en train de s’ouvrir aux acteurs venant de l’extérieur. De l’autre, une éducation spécialisée conçue comme un cocon protecteur fonctionnant telle une mère omniprésente. Et qui est en train de passer de la logique de prise en charge et de substitution à celle de l’accompagnement et de suppléance. L’enseignant renvoie à l’étymologie educare (élever, instruire l’élève pour le faire parvenir à un autre que soi), là où l’éducateur spécialisé se réfère plus à educere (tirer hors de l’enfance vers un autonomie, sans chercher à former l’autre à son image). Si elles veulent travailler en partenariat, les deux professions devront s’acculturer et cultiver une inter culturation réciproque leur permettant de s’enrichir mutuellement : l’enseignant doit renoncer à sa seule maîtrise du temps et l’éducateur spécialisé à la seule protection. Mais la coopération ne se décrète pas. Elle émerge à condition que chacun accepte de se laisser transformer, de faire confiance à l’autre et de s’accorder dans ses manières d’agir. Il reste à combler le fossé entre ces bonnes intentions et la réalité de terrain.

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1322 ■ 06/09/2022