Vivement 18 ans ?

« Tu as 18 ans, mon enfant. Te voilà adulte. Mais tu sais que l’accès à la majorité comporte des droits, mais aussi des obligations. Nous allons donc signer un contrat que chacune des parties devra respecter. De notre côté, nous continuerons à te nourrir, à te loger, à financer tes études, à t’accorder un peu d’argent pour te vêtir et pour tes loisirs. Nous te conseillerons et t’accompagnerons dans le début de ton âge adulte. De ton côté, il te faudra respecter les règles de vie, te responsabiliser et t’autonomiser. Nous ferons le point tous les six mois. Si tu ne remplis pas les objectifs que nous nous serons donnés d’un commun accord, la reconduction du contrat qui nous lie sera remis en cause. Nous serons alors contraints de nous séparer. Tu reprendras ta liberté et nous la nôtre. »
Un tel discours tenu par des parents à leur enfant horrifierait n’importe qui en serait témoin. Outre leur cruauté, brutalité et abjection, de tels propos seraient illégaux, puisque les ascendants et descendants sont tenus à une solidarité réciproque au nom de l’obligation alimentaire. C’est pourtant celui de la protection de l’enfance. S’il est des Conseils départementaux qui mettent un terme à leur prise en charge à l’issue de la minorité légale, bien d’autres maintiennent le Contrat jeune majeur prolongeant l’accompagnement jusqu’à 21 ans … mais, sous conditions, comme une épée de Damoclès suspendue au-dessus de la tête de l’impétrant. Bien sûr, certains jeunes fuient rapidement l’atmosphère de leur placement trop étouffante à leur goût. D’autres restent, mais mettent en grande difficulté le lieu qui les accueille. D’autres encore finissent leur parcours en toute sérénité. Le fonctionnement de l’ASE, après 18 ans, se résume à une triple peine : impossibilité de vivre dans sa famille d’origine, de bénéficier de cette insouciance, désinvolture et nonchalance pourtant propres à cet âge et d’avoir la garantie de ne pas être abandonné. Indigne, choquant et révoltant.

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1324 ■ 04/10/2022

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Mes livres

En mars 2023, j’ai publié aux éditions érès « Fragments de vie d’un référent ASE ». J’y décrivais, à travers 157 vignettes, le quotidien d’un professionnel de cette administration en charge dans notre pays de la protection de l’enfance 




En septembre 2024, j’ai publié aux éditions EHESP « 100 idées reçues sur l’Aide sociale à l’enfance ». Je tentais de répondre à des idées reçues, des préjugés et des contre-vérités ambiantes portant sur cette administration



En décembre 2025, je publie chez Chronique sociale « 50 nuances d’enfants en danger ». Je me lance dans de pures fictions, inspirées par ma pratique professionnelle, dans lesquelles je décris des idéal-types des situations les plus fréquentes rencontrées en protection de l’enfance. Je mets en scène un(e) mineur(e) ou jeune accompagné(e) est son accompagnateur ou accompagnatrice, chacun(e) décrivant de sa place la situation vécue. Il s’agit bien de propos imaginés, ils sont réalistes avec des personnages inventés mais crédibles.


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« Bienvenue sur le site de Jacques Trémintin, travailleur social qui n’a cessé d’écrire. Référent à l’aide sociale à l’enfance de 1992 à 2020, partie prenante de Lien Social de 1995 à 2023, contributeur au Journal du droit des jeunes de 1995 à 2017, pigiste dans le Journal de l’animation depuis 1999… l’accompagnement des enfants et familles, le maniement de la plume ou du clavier, l’animation de colloques ou de formations répondent au même plaisir de transmettre. Ce que fait aussi ce site, dont le contenu est à libre disposition à une seule condition : savoir garder son esprit critique et ne rien considérer d'emblée comme vrai ! »

Retrouvez les sites

du Journal de l’animation : www.jdanimation.fr
et de mon collègue et ami Didier Dubasque : www.dubasque.org